La Bataille du Vatican 1959 – 1965

Tel est le dernier livre de Christine Pedotti, cofondatrice de la Conférence catholique des Baptisé(e) Francophones. Pourquoi écrire un pavé de 570 pages alors que des dizaines d’ouvrages ont déjà été écrits sur le sujet ? Dès que vous en commencez la lecture, vous vous apercevez que c’est un livre tout à fait à part. Il ne s’agit pas d’un traité de théologie. Il s’agit d’une histoire d’hommes et non une histoire d’idées. A partir de très nombreuses chroniques, Christine Pedotti a mis en scène ces hommes, pape, cardinaux, évêques, théologiens, journalistes et on assiste à leurs débats et à leurs questionnements. Tous aiment leur Eglise mais suivant qu’ils sont conservateurs ou progressistes ils expriment plutôt leurs craintes ou leurs espoirs durant le déroulement du Concile Vatican II. Tous ont conscience qu’ils sont les acteurs d’un événement important.

Voici un extrait où intervient le cardinal Siri, conservateur, qui avait été papable lors de l’élection de Jean XXIII. Cela se passe tout au début du Concile

« Dans son dos, il avait entendu une conversation qui lui avait semblé bien malvenue dans un moment pareil. Les cardinaux Frings, Döpfner et Confalonieri s’entretenaient avec une certaine animation d’un message que le concile devrait adresser « au monde ». Il n’avait pu s’empêcher de se retourner et de marquer sa stupéfaction. Il n’avait pas eu le temps de se mêler à la conversation car on annonçait l’arrivée du pape. Mais il était resté dans un sentiment de malaise. Comment pouvait-on en de telles circonstances songer au monde et se trouver d’autres devoirs que ceux que l’on a vis-à-vis du Seigneur et de Sa Sainte Église ? Cette incroyable légèreté de la part d’hommes si considérables l’avait alerté […]. Le cardinal Siri demeurait convaincu que les temps actuels nécessitaient que l’on demeure ferme et vigilant dans le combat de la foi. Le monde s’éloignait de la sainte religion à grands pas. À bien des égards, la foi se perdait. L’athéisme progressait, ainsi que l’indifférence. Mais le pire était sans doute que, dans bien des consciences qui se croyaient encore chrétiennes, le souffle putride du relativisme était passé. L’époque connaissait une grave crise de l’autorité. L’obéissance n’était plus enseignée avec suffisamment de fermeté comme la première des vertus chrétiennes. On voyait partout pasteurs et théologiens négliger la sainte doctrine enseignée de façon constante et sûre, confirmée par les souverains pontifes, et se laisser séduire par des théories aventureuses. Non, en des circonstances si périlleuses pour la foi, le concile devait d’abord affirmer l’unité visible de l’Église autour du successeur de Pierre, unanime dans sa foi. Le concile se devait de réaffirmer avec force et conviction la vérité que le Seigneur lui avait confiée, vérité que nul ne pouvait ni altérer, ni atténuer, ni « adapter ». La miséricorde que l’on devait au monde, c’était celle de la vérité. Quant à l’erreur, il fallait la condamner sans faiblir. »

Ce cardinal reflète bien la mentalité d’avant le Concile : aucune ouverture au monde, obéissance inconditionnelle au pape même si on n’est pas d’accord avec ses décisions, une peur bleue de la modernité, la certitude de détenir la vérité et la condamnation de l’erreur. Vatican II est en rupture avec cette vision des choses, mais les conservateurs, à commencer par Benoît XVI, sont toujours à l’œuvre aujourd’hui. Ils voudraient imposer l’idée que Vatican II se situe dans la continuité de ce qui a précédé.

Un commentaire sur “La Bataille du Vatican 1959 – 1965

  1. Georges,
    Je suis tout à fait d’accord avec vous, Benoit XVI est en contradiction avec l’histoire, car trois conciles sont en ruptures avec l’histoire celui de Jérusalem, de Constance et Vatican II. Mais malheureusement beaucoup de cardinaux par peur du changement essayent de nous faire croire que Vatican II va dans la continuité des précédents conciles, en gros interdire des pensées différentes du pape et de la curie. Dommage que cette vision perdure encore aujourd’hui, mais elle ne l’emportera jamais, car en ce moment des fidèles et des prêtres se soulèvent contre cela. Alors ne perdez pas espoir, mon ami.
    Merci !

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